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Belleville-sur-Saône, 5 février 1880 - † Ozenay, 25 décembre 1973
Gabriel Voisin est l'un des plus célèbres pionniers français de l'aéronautique, tant civile que militaire, ainsi qu'un fabriquant d'automobiles de luxe à la marque "Avions Voisin". Fils d'un industriel de la fonderie, Gabriel Voisin fit ses études aux Beaux-Arts de Lyon. D'abord engagé comme dessinateur, il commença sa carrière en 1903 en travaillant pour Ernest Archdeacon, l'un des promoteurs et mécènes de l'aéronautique naissante.
Pionnier de l'aviation
Gabriel Voisin s'illustra très tôt dans le domaine de l'aviation. En 1905, il modifia un de ses planeurs en hydravion et décolla de la Seine à Billancourt le 6 juin, remorqué par la vedette rapide "La Rapière" à moteur Panhard de 150 ch. Le vol se fit à une altitude de quinze à vingt mètres sur une longueur de six-cents mètres. L'appareil était un biplan à équilibreur avant, à deux flotteurs (de type catamaran), d'une masse à vide de 360 kg et d'une surface portante totale (deux plans) de 50 m². La modification du planeur en hydravion pour des essais sur la Seine avait été financée par Ernest Archdeacon, fondateur de l'Aéro-Club de France.
Avec son frère Charles, il créa en janvier 1907 l'entreprise Voisin Frères dans un vaste atelier situé rue de la Ferme à Billancourt. Leur premier client fut Léon Delagrange auquel ils livrèrent un biplan de 10,50 mètres de long, 10 m d'envergure, présentant un empennage cellulaire à l'arrière et un plan "équilibreur" à l'avant. Leur appareil virait à plat, sans gauchissement, grâce à un léger dièdre du plan supérieur. L'appareil Voisin était équipé d'un moteur V8 à injection directe Antoinette de 50 ch, moteur remarquablement léger pour cette époque. Charles Voisin décolla cet appareil en mars 1907 puis Delagrange effectua un vol en ligne droite de 300 mètres avec le même appareil, le 5 novembre 1907. Enfin et surtout, le même type d'appareil conçu et fabriqué par Voisin Frères et légèrement modifié par Henri Farman permit à ce dernier de remporter, le 13 janvier 1908, le prix Deutsch de la Meurthe-Archdeacon récompensant le premier kilomètre bouclé en circuit fermé avec décollage et atterrissage normaux (autonome).
Malgré la mort de son frère Charles lors d'un accident d'automobile le 12 septembre 1912 avec la Baronne de Laroche, il poursuivit jusqu'en 1914 la construction d'avions d'abord pour les gentlemen-pilotes de l'époque puis pour l'aviation militaire. En 1912 Voisin sortit son biplan de 13,50 m à moteur rotatif de 50 ch et ailerons conjugués qui fut acheté par l'Armée. Il servira de prototype aux biplans Voisin de bombardement à charpente métallique et moteurs de 130 ch utilisés intensivement pour le bombardement de nuit en 1914-1918.
Gabriel Voisin se retira en 1958 sur les bords de la Saône, au Villars, puis non loin de là, dans le petit village mâconnais d'Ozenay. Cette même année, il fut distingué Grand officier de la Légion d'honneur dont il était Chevalier depuis 1909. Il s'éteignit en 1973, à l'âge de 93 ans, et repose depuis dans le petit cimetière du Villars. Sa seconde épouse Henriette est décédée en 1992 à 82 ans.
Citations
"À l'heure de dresser un bilan des évolutions techniques du vingtième siècle, et d'établir de même une ébauche de palmarès des hommes qui l'ont constitué, il est important de ne pas omettre celui qui fut l'un des personnages clés de son époque, offrant à ses contemporains son esprit créatif et l'étendue insoupçonnée de sa verve intellectuelle. Grand constructeur du vingtième siècle, Gabriel Voisin (1880-1973), véritable phénomène d'un monde moderne en devenir, aura ainsi exercé son talent, son génie, dans les deux secteurs de développement caractéristiques du second millénaire: l'aviation et l'automobile. Il sera en effet, durant une trentaine d'années, l'un des industriels français les plus prolifiques en ce qui concerne les projets, et les plus sophistiqués sur le plan des réalisations."
"Épris de mécanique, doué d'une étrange intuition, d'une âme ingénieuse et d'idées à revendre, Gabriel Voisin est un virtuose du bricolage, inventif et généreux, doté de surcroît d'une obstination farouche et d'un caractère bouillant rehaussé d'une truculence langagière peu courante. Personnalité hors du commun, pourvu d'une étonnante capacité d'adaptation, Gabriel Voisin aura déroulé le fil de sa vie entre ombre et lumière, jonglant adroitement entre les exigences d'un marché industriel souvent chaotique et la ligne de conduite, inflexible et résolue, qu'il s'était assignée."
"Lucide, altruiste plus que de raison, présentant une noblesse d'âme que bien peu lui renieront, il était conscient de la destinée unique et légendaire qu'il reçut en cadeau de l'existence. Nanti d'un esprit chevaleresque et d'une humilité à toute épreuve, il incarne à merveille la réussite sociale et le dévouement sans faille à sa patrie aux années sombres de l'histoire."
— Emmanuel Mère, Gabriel Voisin, ou le pionnier magnifique
"Depuis 1924, j'ai toujours trouvé en Gabriel Voisin l'ami le plus sûr. Un génie de la mécanique. Il méprisait Citroën (c'est un ingénieur, un assembleur de pièces). Le goût, la sûreté de ses dessins mécaniques, l'élégance, une continuelle invention: l'aérodynamisme des lignes, la malle arrière, le pneu de secours, l'abaissement du centre de gravité, les "bains-de-pied", pour les pieds des voyageurs, l'arbre central surélevé, l'usage de l'aluminium, l'influence de l'avion sur la voiture. Adoré et admiré des ouvriers. Je l'ai vu enseigner, dans ce langage d'usine qu'il maniait comme personne, ses ouvriers ébahis, se mettant à la place de l'homme, usinant la pièce à sa place. Inventeur comme Vinci. Je l'ai vu inventer des fusils, des pièges, des poêles, des lignes, des mini-moteurs (en Espagne), des meubles. Il peignait, dessinait, sculptait. Il s'est ruiné dix fois..."
"Gabriel Voisin s'est ruiné parce qu'il n'était ni comptable, ni administrateur. Ses voitures trop parfaites, le coût de revient, il n'y pensait jamais. Indifférent à l'argent. Gai, violent, coléreux, enthousiaste, adoré des femmes, emmerdé par leur jalousie. Il avait trois ménages, il déjeunait deux fois avec deux femmes différentes. Rusé, roublard, Don Juan, burlador; doué d'une puissance physique prodigieuse, se tuant au lit et à l'usine. Je l'ai encore vu, il y a six ans, bricolant, montant ses meubles au premier étage au cours d'une inondation (une rivière passait sous sa maison), continuant à faire seul des travaux de géant. Jamais aidé, plein de mépris pour la bêtise, la lenteur des ouvriers, lui qui était l'aristocrate de l'adresse, de l'esprit, de l'audace, de l'invention. Un gentilhomme par la force, le courage, l'intrépidité. Sa vie ne fut qu'une longue lutte, aussi intense que le plaisir qu'il aimait, mais moins que le travail. Un des plus beaux, des plus complets types humains qui traversèrent ma vie."
— Paul Morand, Journal inutile, tome 2, pp. 168-170 (janvier 1974)
Lyon, 12 juillet 1882 - † Corcelles-en-Beaujolais, 26 septembre 1912
Frère cadet de Gabriel Voisin, Charles rejoint celui-ci dès son retour du service militaire dans l'entreprise née de l'association éphémère Blériot-Voisin et qui portera désormais l'enseigne "Appareils d’Aviation Les frères Voisin".
Le 15 mars 1907 à Bagatelle, il accomplit le premier vol mécanique sur un aéroplane muni d’un moteur à explosion (un V8 "Antoinette"), à l'occasion de la mise au point de leur troisième machine destinée au sculpteur et aviateur Léon Delagrange, conçu par Léon Levavasseur. Il expérimente le planeur Chanute au Touquet en mai de la même année.
Il décède d'un accident de la route à bord d'une torpédo Hispano Suiza type Alphonse XIII, en percutant une Darracq au croisement situé sur la commune de Corcelles-en-Beaujolais (au lieu-dit "La Lime"), où la route départementale D9 coupe la D306 (ex-RN6). Élise Deroche est blessée dans cet accident. Une stèle à la mémoire de Charles Voisin est érigée en 1928 à proximité du lieu de l'accident et sera déplacée deux fois à l'occasion des travaux de voirie.
Aéroplanes Voisin (également connu en tant que Voisin Frères) était l'une des premières sociétés aéronautiques françaises, aujourd'hui disparue.
Débuts
La société est créée en 1906 par les frères Charles et Gabriel Voisin. Gabriel avait déjà collaboré avec d'autres pionniers comme Louis Blériot au sein de la société Blériot-Voisin.
En 1906, Gabriel Voisin rachète l'usine Louis Blériot située à Issy les Moulineaux et établi, avec son frère Charles, la société Appareils d'Aviation Les Frères Voisin. Il s'agit alors la "première usine d'avions commerciaux d'Europe". Les premiers avions produits par les frères Voisin sont des monoplaces dessinés par Blériot et propulsés par des moteurs de tracteur. Leur développement se révèle infructueux. En 1907, pionnier de l'aviation, Léon Delagrange commande aux frères Voisin la réalisation d'un avion. Le Delagrange n°1 est le premier aéroplane Voisin à adopter la conception biplan, propulsé par un moteur, il devient la marque de l'entreprise. Delagrange le fait décoller pour la première fois le 2 novembre. Les usines Voisin produisent alors le Delagrange n°2, le premier avion européen à effectuer un vol d'un kilomètre. Henri Farman bat l'un de ses premiers records aux commandes d'un aéroplane Voisin.
Durant les années 1909-1912, l'ingénieur-pilote Louis Gaudart participe activement aux premiers meetings aériens sur biplan Voisin. Non seulement en France (Dinard, Port-Aviation, Rouen, Lyon, Bar-le-Duc…) mais aussi à l'étranger : Hollande, Belgique, Espagne (Madrid, Saragosse, Barcelone).
En 1910, la société conçoit un avion militaire expérimental, exposé au Paris Air Show, mais il n'est pas mis en production. La même année, le Canard Voisin, un hydravion, devient l'un des modèles emblématiques de l'entreprise. Environ quatre-vingt avaient été construits en 1912, lorsque Charles meurt dans un accident de la route.
Première Guerre mondiale
Le Type L, ou Voisin I, est développé en 1912 pour l'armée française. Il effectue des essais avec succès, et quelque soixante-dix appareils sont construits en France, ainsi qu'un petit nombre de Russie, avant qu'il ne soit remplacé par le Type LA ou Voisin III. La production d'un grand nombre de Voisin III débute alors, augmentant avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale. Le Voisin III est suivi par l'amélioration des Type LB et Type LBS, également appelés Voisin IV et Voisin V. La production du Type LC, ou Voisin VII, plus grand que ses prédécesseurs, débute en 1916, mais elle se révèle être un échec et seulement une centaine d'exemplaires sont construits.
Peu de temps après le déclenchement de la Première Guerre mondiale, il est devenu évident que l'industrie de l'aviation française ne pouvait pas produire des avions en nombre suffisant pour répondre aux besoins militaires. Les industriels présents dans d'autres champs d'activités deviennent des sous-traitants, et plus tard des constructeurs sous licence, pour l'industrie aéronautique. Le premier de ces partenariats est signé entre Louis Breguet et Michelin. Gabriel Voisin prend du retard dans ce domaine, bien que ses créations soient produites en quantité par ses partenaires de Russie. En 1918, Voisin établit deux partenariats qui débouchent sur la création de coentreprises Voisin-Lafresnaye, un constructeur de fuselage, et la société Voisin-Lefebvre, un constructeur de moteurs d'avions.
Après le Voisin VII vint l'avion le plus puissant produit par les Aéroplanes Voisin, mais aussi celui qui connut le plus de succès, à savoir les Type LAP et Type LBP, connus sous le nom Voisin VIII. Cet avion sera le principal bombardier de nuit pour l'armée française en 1916-1917, avec plus de mille exemplaires construits. La conception du Voisin IX ou Type LC, destiné à être un avion de reconnaissance, est un échec et il est supplanté par le Salmson 2 et Breguet 14. Le Voisin X, Type LAR et Type LBR, consiste en une amélioration du Voisin VIII avec un moteur Renault plus fiable à la place du moteur Peugeot qui l'équipait auparavant. Les livraisons sont retardées à plusieurs reprises, mais près de neuf cents sont construits avant la fin de la guerre.
Le dernier modèle de conception Voisin, le Voisin XII, réalise des essais avec succès en 1918, mais la fin de la guerre rend sa mise en production inutile. Contrairement aux aéroplanes Voisins précédents, le Voisin XII est un grand bombardier de nuit biplace.
La Société des Automobiles Avions Voisin
En 1918, la guerre terminée, il se détourna de l'aviation et se lança dans la construction d'automobiles, domaine qui lui paraissait constituer un marché plus prometteur. En juin 1919, Gabriel Voisin présenta son premier modèle: la C-1; il sera construit à près de cent exemplaires jusqu'en 1920. Après quelques tentatives dans les voiturettes et les motocyclettes, il se consacra à des modèles très étudiés: d'abord la C-1 à quatre cylindres puis la C-2 à douze cylindres en V. Vinrent rapidement la C-4 d'entrée de gamme et les C-S à tendance sportive. Il produisit près de mille voitures par an et remplaça son modèle à succès, la C-4, par la C-7 à partir de 1925. Un an plus tard, il livra ses voitures entièrement carrossées, contrairement aux usages de l'époque où les constructeurs fournissaient des châssis nus aux carrossiers. Au niveau sportif, il tenta, en 1923, d'appliquer de façon approfondie la technique aéronautique au prototype Voisin Laboratoire: optimisation du poids, carrosserie profilée en aluminium, pompe à hélice, absence de différentiel. Malheureusement, le manque de puissance des moteurs ne permit pas de grands résultats. Il lança ensuite la C-11, une six cylindres livrable avec une carrosserie en aluminium largement vitrée dite "lumineuse", évoluant en C-14 jusqu'en 1932. De 1920 à 1930, la marque Voisin fournira les voitures présidentielles de Paul Deschanel, d'Alexandre Millerand puis de Gaston Doumergue.
Son inventivité, son tempérament exigeant, et son intransigeance conduisirent rapidement Gabriel Voisin à produire essentiellement des véhicules haut de gamme: C-12, C-16, C-18, C-20, C-22 et C-24. L'incendie de son usine, mal assurée, puis la crise économique de 1929 entraînant la morosité du marché automobile dans les années 1930 l'obligèrent à laisser le contrôle de ses usines à des financiers. Reflétant son passé aéronautique, Voisin présenta la C25 Aérodyne au Salon de Paris de 1934 puis, en 1935, l'Aérosport C-28 "ponton" sans ailes séparées.
Plusieurs projets restèrent à l'état de prototype tel la C-26, présentée en 1934, ou au stade d'exemplaire unique comme le coupé C-27 Aérosport avec son toit coulissant dans la malle arrière.
En 1938, Gabriel Voisin produisit quelques exemplaires de la C-30 équipée d'un moteur Graham-Paige dont le châssis inspirera André Lefèbvre pour certains éléments de la Citroën DS et qui sera la dernière Voisin. Sa longue fidélité aux moteurs sans soupape, à chemises mobiles, du type Knight, qui fut un avantage aux débuts des années 1920, où les ressorts des soupapes avaient une faible durée de vie, devint un inconvénient et l'empêcha de présenter des moteurs performants et fiables. Ils permirent néanmoins à Voisin de détenir de nombreux records de vitesse sur de longues distances, entre 1925 et 1930: dix mille kilomètres à 147 km/h de moyenne, puis trente mille kilomètres à 133 km/h de moyenne et, enfin, les cinquante mille kilomètres à 120 km/h de moyenne en 1930.
Après la Seconde Guerre mondiale, il dessina le Biscooter, voiturette à moteur de 125 cm3 qui, légère et rustique, était conçue pour doter la France d'un véhicule économique mais qui fera carrière en Espagne.
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